Carême en ligne

« Tu as du prix à mes yeux...» (Is 43, 4)

Une brève présentation du Temps de Carême par Fr. Xavier Kodjè BALOGOUN, OP

Introduction

La tentation de Jésus manifeste la manière qu’a le Fils de Dieu d’être Messie, à l’opposé de celle que lui propose Satan et que les hommes désirent lui attribuer. C’est pourquoi le Christ a vaincu le Tentateur pour nous : « Car nous n’avons pas un grand prêtre impuissant à compatir à nos faiblesses, lui qui a été éprouvé en tout, d’une manière semblable, à l’exception du péché » (He 4, 15). L’Église s’unit chaque année par les quarante jours du Grand Carême au mystère de Jésus au désert.

1. Définition

Carême vient du mot latin « quadragesima » c’est-à-dire quarante. C’est la période de quarante jours de préparation à la semaine sainte et à Pâques. Selon les calculs, on comptait quarante jours avant Pâques ; et le carême commençait le quarantième dimanche avant Pâques : c’est le dimanche de la quadragésime (quadragesima dies : le quarantième jour). À partir du VIIè siècle, on ne comptait plus les dimanches parmi les jours de jeûne et donc de carême. Pour obéir au chiffre quarante, il a fallu ajouter aux trente-six jours quatre jours supplémentaires; ce qui fait commencer le carême au mercredi des cendres.

Le carême en tant qu’exercice de quarante jours trouve ses racines dans le cheminement de quarante ans des fils d’Israël au désert et des quarante jours de Jésus au désert. La traversée du désert pendant quarante ans par les Israélites était une marche vers la terre promise. Le combat de Jésus au désert était une préparation à entrer dans sa mission active. Dans ces deux événements témoins et guide, l’obéissance à Dieu et la foi en sa présence constituent des lieux d’appel à la conversion des chrétiens et à une sereine préparation à Pâques.

2. Le mouvement de la conversion

Le mouvement de la conversion et de la pénitence a été merveilleusement décrit par Jésus dans la parabole dite « du fils prodigue » dont le centre est « le père miséricordieux » (Lc 15, 11-24 ) : la fascination d’une liberté illusoire, l’abandon de la maison paternelle ; la misère extrême dans laquelle le fils se trouve après avoir dilapidé sa fortune ; l’humiliation profonde de se voir obligé de paître des porcs, et pire encore, celle de désirer se nourrir des caroubes que mangeaient les cochons ; la réflexion sur les biens perdus ; le repentir et la décision de se déclarer coupable devant son père ; le chemin du retour ; l’accueil généreux par le père ; la joie du père : ce sont là des traits propres au processus de conversion. La belle robe, l’anneau et le banquet de fête sont des symboles de cette vie nouvelle, pure, digne, pleine de joie qu’est la vie de l’homme qui revient à Dieu et au sein de sa famille, qui est l’Eglise. Seul le coeur du Christ qui connaît les profondeurs de l’amour de son Père, a pu nous révéler l’abîme de sa miséricorde d’une manière si pleine de simplicité et de beauté.

3. Carême : Temps de préparation à Pâques

Le carême reste le temps de préparation à Pâques. Dans la liturgie catholique, la fête de Pâques représente la plus grande fête chrétienne dont la préparation immédiate était faite pendant la semaine sainte. Au cours de cette semaine, les chrétiens revivent les derniers moments de Jésus. Cette semaine s’ouvre par l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem : dimanche des rameaux et de la passion. Initialement, la passion faisait l’objet, avant le concile Vatican II, d’une semaine de célébration avant les rameaux, mais depuis la réforme liturgique, les deux événements sont célébrés dans la même semaine. Les lundi, mardi et mercredi saints préparent au mystère de Dieu devenu homme pour le salut des hommes. Le jeudi saint, l’Eglise célèbre l’institution de l’Eucharistie, le don de son corps et de son sang comme véritables nourritures pour la vie qui ne finit pas. Ce sacrifice parfait du Christ sera concrétisé le vendredi saint : jour de la passion, jour du jeûne par excellence et de la méditation sur le mystère de la croix ; jour de retour sur soi et de pénitence, de l’union aux souffrances du Christ pour le salut de tous. Le samedi saint est le jour de l’attente de la résurrection, lumière se levant dans les ténèbres des hommes. Et le dimanche de Pâques célèbre la joie de cette espérance et l’allégresse de son accomplissement.

4. Carême : Temps d’exercice spirituel

Le temps de carême est le temps de trois exercices habituels : le jeûne, l’aumône et la prière. En effet, jusqu’au IVè siècle, le carême était le temps de préparation des catéchumènes. C’est à partir du IVè siècle que se développe la tendance pour l’Eglise de faire du temps du carême un temps de pénitence et de renouvellement pour toute l’Eglise avec la pratique du jeûne, de l’abstinence de certains aliments, en l’occurrence de viande (le jeûne est obligatoire dans l’Eglise d’Occident, le mercredi des cendres et le vendredi saint, et l’abstinence de viande les vendredis de carême). Cet exercice est médicalement prouvé comme bienfaisant pour l’organisme humain. La nature elle-même se dépouille à certains moments. Mais on ne jeûne pas pour jeûner. Le jeûne est toujours en fonction de quelque chose, d’un changement de vie. Le carême, c’est aussi le temps de la charité, de l’aumône et du partage. L’Eglise rappelle à ses fidèles qu’ils doivent partager avec les plus pauvres, faire des dons en nature aux Caritas et autres organismes de charité. Le temps de carême est aussi le temps de prière et de retraite spirituelle, de mortification. Le jeûne va de pair avec la prière. Il s’agit de lutter contre le péché et le mal en imitant Jésus au désert pendant quarante jours ou en se rappelant la traversée du désert par les juifs pendant quarante ans où ils avaient à se détourner de toutes les idoles et à revenir à la fidélité à Dieu. Le carême est essentiellement orienté vers Dieu qu’il honore et vers nos frères et sœurs qu’il réconforte.

Conclusion

Par le temps de carême, le chrétien est invité à « secouer sa torpeur et à raviver sa foi. Temps de pénitence, le carême est également présenté par la liturgie comme un temps de joie, car il est déjà éclairé par la lumière de Pâques. La Résurrection du Christ est déjà présente dans la pénitence du carême, qui aide le chrétien à mourir à lui-même pour revivre pleinement en Jésus ressuscité. Temps par conséquent non pas de tristesse mais de retour à Dieu, de conversion, d’ouverture à autrui, par retranchement de tendances et d’attitudes qui s’y opposent ». (cf. THEO, Encyclopédie catholique pour tous, 1992, p .924).

Fr. Xavier Kodjè BALOGOUN, op.

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